Tournoi des six nations 2022 : les Bleus vainqueurs de leur bras de fer face à l’Irlande

A voir Antoine Dupont filer à l’anglaise à peine le coup d’envoi sifflé, et inspiré, s’en aller ouvrir la marque dans l’en-but irlandais, les 80 000 spectateurs du Stade de France ont pu croire, quelques instants, qu’une partie pétillante de rugby les attendait, samedi 12 février. Il n’en a rien été. Le XV de France l’a emporté face à l’Irlande sur la pelouse de Saint-Denis pour sa deuxième sortie du Tournoi des six nations (30-24), au terme d’un « match rugueux et rude », résume le troisième ligne François Cros.

Six jours après une entrée en matière bouclée sur un « sentiment d’inachevé » face à l’Italie (victoire 37-10), Antoine Dupont et ses partenaires ont livré une partition bien plus aboutie, haussant leur niveau « d’un cran ou deux », comme requis par leur entraîneur. Opposés à une équipe restant sur neuf succès de rang, rutilante mécanique au rugby méticuleux, les Bleus se savaient attendus. Mais comme à l’automne, face aux All Blacks, ils ont déroulé leur jeu dans une première période toute en maîtrise.

« On savait qu’ils allaient être omniprésents dans les combats au sol, à n’importe quel endroit ou moment de la partie. On savait qu’ils allaient nous faire la guerre », souffle le deuxième ligne Thibaud Flament, entré à vingt minutes du terme. Prévenus, les Bleus avaient préparé la riposte : se muer en poil à gratter pour rendre inconfortable les attaques du Trèfle. « Quand tu es sevré de ballons, c’est plus difficile de jouer », expose le pilier Cyril Baille.

Un « trou d’air », et ça repart

« L’Irlande est une équipe très propre, qui ne fait pas beaucoup de fautes et conserve très bien le ballon », insiste François Cros, auteur d’« une prestation XL » d’après son entraîneur. « Quand on les laisse imposer leur rythme, et réciter leur rugby, on sait qu’ils sont très dangereux. » La semaine passée, le Pays de Galles n’a pu que le constater, subissant vague verte sur vague verte à Dublin (défaite 29-7) ; et les Bleus en ont fait de même en début de deuxième période.

Car après avoir proposé quarante premières minutes de haut vol, reléguant l’Irlande à 13 points (22-7 à la pause), et ne leur laissant que des miettes – un essai inscrit sur un renvoi, à la suite d’un cafouillage défensif tricolore –, les Bleus ont connu un « trou d’air », selon leur capitaine. Costauds jusque-là, combatifs et d’un réalisme tout… irlandais (cinq coups de pied réussis pour Melvyn Jaminet en première période), les Français ont subi une furia verte.

En moins de temps qu’il en faut pour épeler le nom du puissant Josh Van der Flier – auteur du deuxième essai irlandais –, le XV du Trèfle était revenu sur le râble des Bleus (passant de 22-7 à 22-21). Et le Stade de France, un instant incrédule, donnait raison à James Ryan, capitaine irlandais d’un soir (en l’absence de Johnny Sexton), qui avait annoncé que ses troupes allaient tenter de « calmer les ardeurs » du public tricolore. Machine parfaitement huilée et invaincue depuis neuf matchs, l’Irlande rappelait aux Français qu’elle n’était pas venue à Saint-Denis assister à un récital, mais entendait bien jouer son rôle. Ayant encaissé un 14-0 en quatre minutes, les Bleus faisaient grise mine.

« En deuxième mi-temps, on s’est un peu grisé. On a un peu négligé la collision, et on a un peu dévié de notre projet défensif », a constaté Fabien Galthié. Mais son équipe de France a pris de la bouteille, depuis deux ans, et ne sombre plus quand le navire tangue. Comme face aux Néo-Zélandais en novembre, les coéquipiers d’un Gregory Alldritt une nouvelle fois omniprésent ont laissé passer la tempête, avant de reprendre leur marche en avant. « Contre ces équipes, il faut accepter d’avoir des temps faibles, en parvenant à limiter leur impact qui est parfois violent », a insisté le sélectionneur tricolore, fier de la manière dont ses troupes ont géré la partie.

« Savoir rester froid dans les moments chauds »

« C’est la force de ce groupe, savoir rester froid dans les moments chauds », a savouré François Cros après la partie. Affichant leurs certitudes, ses partenaires n’ont jamais dérogé à leurs principes de jeu. Et profité de leur profondeur de banc pour accentuer la pression sur le XV irlandais.

Face aux rugueux Irlandais, la stratégie française ne laissait guère de place pour la délicatesse. Avec « additionner la rudesse », en guise de mot d’ordre professé par Fabien Galthié avant la rencontre, les Bleus étaient venus pour « une bonne guerre », comme l’avait exprimé Cameron Woki. Et dans cette équation, pas de place pour des inconnues envoyant du jeu. En guise de remplaçants – ou « finisseurs », selon l’expression désormais consacrée –, Fabien Galthié avait choisi six avants « trépignant du sabot d’apporter [leur] énergie, pour permettre de gagner les vingt dernières minutes du match » contre deux arrières. Comme face à la Nouvelle-Zélande, « cette option tactique risquée a produit ses effets », a salué le technicien lotois.