Pour accélérer la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), la jeunesse doit servir de catalyseur. C’est pourquoi Afreximbank consacre ses 29e Assemblées annuelles, qui se tiennent du 15 au 18 juin au Caire, en Égypte, au thème « Réaliser le potentiel de la Zlecaf dans l’ère post-Covid19 : Tirer parti du pouvoir de la jeunesse ».
De notre envoyé spécial au Caire, Seydou KA
« Réaliser le potentiel de la Zlecaf dans l’ère post-Covid-19 : tirer parti du pouvoir de la jeunesse ». Tel est le thème des 29e Assemblées annuelles de l’Afreximbank (banque africaine d’import-export) qui se sont ouvertes, hier, dans la nouvelle capitale administrative, au Caire, en Égypte. Ces Assemblées annuelles se tiennent dans un contexte marqué par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine. Cette double crise a fortement perturbé la chaine de valeur logistique mondiale. Dans ce contexte, « il faut aller vers un marché africain commun le plus rapidement possible », a préconisé l’Ambassadeur Albert Muchanga, Commissaire de l’Union africaine pour le développement, le commerce, le tourisme, l’industrie et les mines. Pour y arriver, il faut donner le pouvoir aux jeunes afin d’en faire les catalyseurs de la transformation économique et de la révolution industrielle du continent, a estimé Benedict Oramah, Président Directeur d’Afreximbank. « Nos dirigeants ont fait le travail courageux de nous donner la Zlecaf. C’est grâce à la jeunesse que nous allons déclencher l’expansion économique de l’Afrique », espère-t-il. Pour lui, la jeunesse a toujours été le catalyseur des transformations économiques et à la base de chaque révolution industrielle dans les économies avancées. Par exemple, lorsque les États-Unis et le Canada sont montés au rang de grandes puissances industrielles en 1900, leur population de moins de 45 ans était de 83 % et 82 %, respectivement ; et la population entre 15 et 45 ans était de 48% et 47% dans les deux pays. Les jeunes ont également joué un rôle central dans le miracle asiatique qui a propulsé l’Asie du Sud-Est de la pauvreté à la prospérité des années 1970 aux années 1990. En 1980, la population de moins de 45 ans en Chine, en Corée du Sud, en Malaisie, à Singapour et à Taïwan variait entre 76 % et 80 %. « La bonne nouvelle est que l’Afrique se retrouve exactement au même endroit que les États-Unis et le Canada dans les années 1900 et l’Asie en développement dans les années 70, 80 et 90 », a indiqué Benedict Oramah. Aujourd’hui, 85 % de la population du continent a moins de 45 ans et 45 % a entre 15 et 45 ans. Un « atout » « plus précieux que toutes les ressources pétrolières et minérales ». Pour accompagner l’énergie créatrice de la jeunesse africaine, Afreximbank a mis en place différents outils, notamment un fonds de 500 millions de dollars. Grâce à cette initiative, Afreximbank s’associe au Centre du commerce international (Itc en anglais) pour former les propriétaires de petites entreprises et les jeunes entrepreneurs en Afrique au commerce avec d’autres pays africains dans le cadre de la Zlecaf.
Repenser les chaines de valeur
Selon Tarek Amer, Gouverneur de la Banque centrale égyptienne, l’Afreximbank est « une bonne base » pour lutter contre la pauvreté et surtout l’inflation qui préoccupe les dirigeants du monde entier. Cependant, il invite les banques centrales africaines à être « plus agiles, plus innovantes », afin de lutter plus efficacement contre l’inflation et absorber les chocs négatifs. En effet, avec la guerre en Ukraine et les sanctions occidentales contre la Russie, Michael Spence, professeur d’économie et de business à l’Université de New York et lauréat du Prix Nobel estime qu’il faut repenser les chaines de valeur et la Zlecaf est « un accélérateur pour booster l’économie d’un continent de 1,4 milliard de consommateurs ».
Vera Songwé, Directrice exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (Cea), estime que la rupture des chaines de valeur mondiales impose à l’Afrique de revoir ses structures de production, tout en résolvant ses problèmes de connectivité. Analysant la succession des crises, ces quarante dernières années, Donald Kaberuka, ancien président de la Banque africaine de développement (Bad), estime que l’objectif n’est pas de les éviter, mais de savoir « les gérer en reconstruisant nos économies, afin d’éviter la résurgence de ces crises ». À son avis, l’un des enseignements essentiels de la crise russo-ukrainienne, c’est la nécessité de « créer un marché unique africain et un système de paiement autonome qui mettra le continent à l’abri des conflits géopolitiques et leurs implications sur le cours des devises ».