17 février 2011… 17 février 2021. Cela fait exactement 10 ans que l’étincelle de la révolution libyenne a jailli.
Une minuscule lueur qui, contrairement aux attentes, allait provoquer un incendie qui aujourd’hui encore continue de ravager le pays tout entier sans que quiconque sache ni comment ni quand on en viendra à bout. En effet, dans le sillage du printemps arabe qui a soufflé sur la Tunisie, balayant le régime Ben Ali, puis sur l’Egypte en faisant de même avec le pouvoir militaire d’Hosni Moubarak, des Libyens ne voulant pas s’en laisser compter se sont lancés à l’assaut de la forteresse khadafienne, symbole à leurs yeux de tout le mal-être du pays.
Tout a commencé à Benghazi le 17 février 2011 lorsqu’après deux jours de manifestations pour la libération d’un avocat militant des droits de l’homme la foule est violement dispersée. La colère grandit, se transforme en rébellion armée et telle une traînée de poudre, finit par mettre le pays à feu et, à sang. Le 17 mars, le conseil de sécurité de l’ONU vote la résolution 1973 permettant l’intervention militaire de la communauté internationale pour « protéger la population civile libyenne ». Le 20 août, les révolutionnaires prennent Tripoli et le 20 octobre, des avions de l’Otan frappent un convoi qui tentait de fuir Syrte avec Kadhafi et une centaine de ses fidèles. Le Guide, un de ses fils et 80 personnes seront massacrés.
10 ans après, le rêve qui avait nourri la révolution libyenne s’est révélé être un cauchemar sans fin. L’Etat libyen n’existe plus et ce qui en tient lieu n’a aucune emprise sur le quotidien des populations livrées à elles-mêmes. Et telle une dépouille le pays est à la merci d’une multitude de groupes armés qui s’en disputent les parties les plus charnues. Et ce sont des puissances étrangères et régionales aux intérêts divergents qui s’affrontent pour le contrôle des gisements pétroliers et des positions géostratégiques.
Le pays qui vivait certes sous la chape de plomb d’un demi-siècle de dictature pouvait alors s’enorgueillir de ses nombreux acquis sociaux comme l’accès à la scolarité, à la santé et au logement. On objectera que durant les 42 ans de la Jamahiriya il n’y avait pas de droits de l’homme, de démocratie et encore moins de liberté. Mais au moins la situation n’aurait pas pu être pire que celle à laquelle le monde entier et les Libyens assistent aujourd’hui.
Voici donc le pays de Kadhafi au milieu du gué, qui aurait nettement préféré un impossible retour en arrière mais qui ne peut non plus avancer vers le rivage de la démocratie que lui faisaient miroiter les Occidentaux à l’image de la France et du Royaume-Uni. Des alliés qui, il y a dix ans, à travers l’Otan, ont pesé de tous leurs armements pour mettre un point final aux 4 décennies de pouvoir du Guide et de sa Jamahiriya.
Il faut dire donc que c’est certainement avec amertume que les Libyens commémoreront cette révolution dont l’âpreté des fruits leur reste, 10 ans après, en travers de la gorge. Et beaucoup d’entre eux auraient certainement préféré la stabilité sous la férule du Guide, que cette chienlit sans fin.